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We're Differents
Voici ma dernière histoire, encore en cours de réalisation
Suivez Dan et Alex, des ados de 17 ans pas vraiment comme tous les garçons de leur âge, qui vont vivre un futur commun que tous les deux n'auraient cru possible qu'en rêves...
Affaire à suivre !!
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Par Shin Kazumi le 28 Janvier 2014 à 17:49
Mon nom est Dan. J’ai 17 ans et je suis en deuxième année de lycée. Je suis un ado que mes parents voient « comme les autres ». Mais je ne le suis pas.
Depuis tout petit, j’ai une adoration pour tout ce qui touche au gothique. Je m’habille en cuir tous les jours et écoute du rock à longueur de journée. En plus, je suis plutôt doué en dessin, peinture et photographie.
Je vous entends d’ici : « mais ce n’est pas si anormal que ça ! » Mais ce n’est pas tout !
Depuis un moment déjà, je suis gay.
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Par Shin Kazumi le 28 Janvier 2014 à 17:52
Aujourd’hui, c’est lundi. Un jour maudit.
Mon réveil sonne à 6h30 pour la première fois depuis deux jours, mon petit déj’ passe en vitesse grand V, ma mère est encore à la bourre pour son travail,…
Foutu lundi de merde…
J’habite à un quart d’heure à pied de mon lycée. J’y vais seul, comme toujours. Comme chaque lundi, le premier cours est le français. La classe des 1ère 3 – la mienne, malheureusement – est la seule classe qui, depuis la création du lycée, ait réussit à faire partir 6 profs de littérature en dépression.
Pourquoi a-t-il fallu que je me retrouve dans cette… chose… ?
Mais mon malheur ne se trouve pas dans les cours à proprement parler, mais plutôt dans ce qui compose cette classe. La grande majorité des élèves sont… des filles ! Bordel… La gente féminine m’énerve beaucoup, pour ne pas dire indéfiniment. Je n’ai rien contre elles, mais cette façon qu’elles ont toutes d’allumer les gars du lycée m’horripile. Je me demande comment elles font pour survivre en plein hiver, à 0°, en mini jupe et veste en jean !
Un bruit strident me sort soudain de mes pensées.
Tiens, alors il vient en cours ?
Alex, le gars le plus populaire de tout le lycée vient de rentrer dans la salle. Les filles sont en extase devant lui depuis la rentrée de l’année dernière. C’est le capitaine de l’équipe de basket du lycée et il a la carrure d’un mannequin. Mais, à part ça, il n’a pas grand chose. Il a raté la moitié des cours, l’an dernier, et a réussi à passer en première de justesse. Cette année, on est au milieu du premier trimestre et il a déjà sauté une vingtaine de cours.
Comment les filles peuvent-elles admirer un blaireau pareil ?
- Tout le monde à sa place !! beugle la prof – qui ne fera sûrement pas long feu…
Toute la classe s’exécute dans les 15 minutes qui suivent. Ce lundi aurait pu être un lundi aussi soporifique que tous les autres, mais cela ne suffit peut-être pas à cette nouvelle prof.
- Je vais faire des changements dans l’organisation de la classe, dit-elle d’un ton assuré.
Pitié qu’elle ne fasse pas « une fille avec un garçon » !!
- Bon, comme il y a une majorité de filles dans la classe, ce serait discriminatoire de faire « une fille avec un garçon » sachant que certaines filles seraient entre elles et d’autres non…
Et les mecs, t’en as rien à foutre ?
- Je vais donc mettre tous les garçons à côtés d’autres garçons et toutes les filles avec des filles ! reprend-elle d’un ton trop enjoué.
Les filles sont heureuses, les gars aussi… Mais je ne sais pas pourquoi, je sens que ma tranquillité du fond de salle va me manquer… La prof s’empare de la liste des élèves et commence à placer tout le monde. Par malheur, elle a aussi les photos individuelles de chacun d’entre nous. Impossibilité qu’elle se plante dans les prénoms.
- Dan, tu seras à côté d’Alex.
Je manque de m’étouffer avec ma propre salive. Avec LUI ?! La Guimauve de ces Dames vient s’asseoir à côté de moi, tout sourire.
- Salut, euh… Dan ?
La prof vient de dire mon nom, mais il hésite encore. Un boulet reste un boulet. Pour toute réponse, je me contente de hocher la tête. Je suis peut-être gay, mais pas crétin au point d’être attiré par… ça ! Sentant une certaine tension dans mon attitude, Alex reste silencieux le reste de l’heure. A la sonnerie, il brise ce silence :
- Sympa, ton look, décroche-t-il avant de s’en aller en cours de bio.
Le reste de la journée est un calvaire délicieusement familier. Aucun abruti pour déranger mon ennui à l’horizon. Que du bonheur ! Mais la Guimauve de ces Dames pense sûrement avoir été absente trop longtemps.
- Hé ! Dan !
Je soupire avant de me retourner.
- Quoi ?
Mon ton est froid et indifférent. La plupart du temps, les gens en sont effrayés ou insultés. Alex n’est pas une exception. Il lève les deux mains au ciel.
- Woh, du calme, mec ! Ce n’est que moi !
Justement.
- Je voulais te dire un truc, aujourd’hui, mais t’as pas dû m’entendre… commence-t-il.
En fait, si, je l’ai très bien entendu. C’était à la pause de midi, monsieur voulait me parler d’un truc "important". Mais je l’ai ignoré et je suis parti en salle d’art pour mon club.
- J’avais des trucs à faire, je dis nonchalamment en tournant le dos à mon interlocuteur.
- Hé, m’ignore pas encore une fois, steuplé ! s’exclame-t-il en me choppant le bras.
Je le regarde et j’arque un sourcil. Si t’as remarqué que je t’ignorai, pourquoi t’insiste, du con ? Ledit Du Con répond à ma question muette :
- C’est important, alors j’insisterai le nombre de fois qu’il faudra.
- Que c’est chevaleresque. Maintenant dépêche-toi de me dire ce que tu veux, je suis pressé.
Alex ravale sa salive. Le légendaire self-control des populaires… L’aurai-je irrité ? Un sourire furtif se dessine sur mes lèvres.
- D’après les rumeurs…
Alors là, déjà, ça part mal. Mon sourire se barre à vive allure.
- …tu es un bon dessinateur, alors…
- Je t’arrête tout de suite, ce ne sont que des rumeurs. Passe ton chemin.
Le dessin, un sujet à ne pas aborder si c’est la première fois qu’on me parle. Pour les gens de ma classe, je n’existe que pour les dessins et les photos. Le reste du temps, je ne suis pas "quelqu’un de fréquentable". Je commence à partir.
- Attends, Dan !
Il me suit jusqu’à un tournant. Je lui attrape le bras et le plaque contre le mur avec une force que je n’ai peut-être pas maîtrisée. Ma voix se fait cinglante.
- Alors écoute, Alex (j’insiste sur ce dernier mot), si tu m’as dérangé pour me parler de dessins, tu ferais mieux de te taire à partir de maintenant. Continue de séduire des pigeonnes comme tu le fais les rares jours où tu es présent et fiche-moi la paix.
Je le lâche violemment. Contre toute attente, le mec en face de moi se met à rire.
- Tu mâches pas tes mots, toi ! plaisante-t-il. T’es comme ça avec tout le monde ? Je comprends mieux pourquoi on m’a déconseillé de venir te parler.
- Es-tu stupide au point de ne pas comprendre ce qu’on te dit ?
- Es-tu renfermé au point de ne pas vouloir écouter une demande ?
J’écarquille les yeux. Quoi ? Je n’aurai jamais pensé qu’un idiot comme lui puisse avoir de la répartie. Ou tout simplement un cerveau…
- Maintenant que tu es disposé à m’écouter, continue mon adversaire, laisse-moi parler jusqu’au bout, s’il te plaît. Je disais donc que, comme tu es doué en dessin, j’aimerai que tu me rendes un service.
Je soupire. Je sais ce qu’il va me demander.
- Tu veux que je fasse ton portrait.
- Faux.
J’écarquille une nouvelle fois les yeux.
- J’aimerai que tu m’apprennes à dessiner.
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Par Shin Kazumi le 19 Février 2014 à 16:54
Aujourd’hui, c’est mardi. Un jour que je n’aurai jamais pensé plus maudit que le lundi. La semaine dernière, notre très chère prof de français a décidé de changer toute la classe de place, et je me suis retrouvé à côté d’Alex, le beau gosse de toute la classe.
Certes, il est beau, mais il n’a vraiment que ça.
Depuis une semaine, donc, ce type me colle. A la cantoche, pendant les pauses, et même sur le chemin du retour ! Je ne sais pas ce qu’il lui prend, mais depuis ce malheureux lundi, il doit penser que nous sommes devenus meilleurs amis…
Enfin, je dis ça, mais je dois bien avouer que, au plus profond de moi-même, ça ne me dérange pas tant que ça. Après tout, il est beau, et même s’il fait le con à longueur de journée, il peut être sérieux. La preuve : nous nous sommes vus deux fois dans la semaine pour que je lui apprenne à dessiner, et il était plus sérieux que jamais !
Il avait une expression… déconcertante.
Mon nouveau camarade de français, Alex, a décidé par je ne sais quelle malédiction d’apprendre à dessiner. Et c’est à moi qu’il a demandé de lui donner des cours !
La première matière du jour est encore français. Et aujourd’hui, on a deux heures. Deux heures à côté d’un navet ambulant… Je soupire avant même d’apercevoir Alex passer la porte.
- Salut mec ! sourit-il de toutes ses dents – un peu trop blanches – en frappant mon épaule. Comment ça va ?
- Ça allait. Avant que t’arrives.
Un rictus s’échappe de sa gorge. Tu l’as cherché !
- Toujours aussi sympathique, Dan, soupire-t-il. Franchement, qu’est-ce que je t’ai fait ? On s’est jamais parlé, avant !
La prof nous demande de nous asseoir. Je ne peux m’empêcher de répondre à la question de mon voisin :
- Justement. T’es jamais en cours et les rares fois où tu y es, tu dragues les dindes qui nous servent de camarades. J’avoue que je ne comprends pas tes motivations…
- Je drague les dindes qui nous servent de camarades ? Je drague personne ! plaide-t-il. Et si je ne viens pas tous les jours en cours, c’est pour des raisons personnelles.
J’arque un sourcil. Raisons personnelles ?
- Si tu ne dragues pas, ces pintades sont vraiment décérébrées…
- T’aimes pas les filles, toi, hein ?
- Juste les allumeuses.
Mon voisin pouffe de rire. Le reste des deux heures est un mélange entre la vie du romancier Balzac et les blagues d’Alex. Je dois bien l’admettre, ce type a quand même un bon sens de l’humour. Puis, soudain, me vient une idée.
- J’accepte de te donner des cours de dessin, je dis en faisant semblant de lui expliquer une phrase, mais en contrepartie, tu m’apprends à jouer au basket. T’es partant ?
Je le regarde, un peu inquiet. J’ai toujours adoré le basket, mais les cours d’art que me payaient mes parents me demandaient trop de temps. J’ai terminé les cours il y a deux ans, j’ai donc du temps libre. J’ai pas trop l’habitude de parler de ce genre de chose… Alex demeure un instant stupéfait, puis il sourit comme un gosse.
- No problem, man !
Un sourire se dessine sur mes lèvres. La sonnerie retentit. Toute la classe se barre en courant hors de la salle sans même attendre que la prof ait terminé de donner les devoirs. Au moins, ça, ça change pas.
Pendant les dix minutes qui nous sont gracieusement laissées par le lycée, j’ai ma vieille habitude de dessiner assis sur un banc à l’arrière du bâtiment. Donc, comme tous les jours depuis maintenant 6 ans, je pars en vitesse me chercher un banc vide. A l’arrière du lycée, il y en a toujours pleins de vides. Mais mon cher voisin de table de français a décrété que, aujourd’hui, il ne me foutrait pas la paix… de la journée !
- Hé, Dan ! m’appelle-t-il alors que je pose mes fesses sur le banc. Qu’est-ce que tu fous ?
Je le regarde, dépité d’une telle question.
- Je danse, ça se voit, non ?
Alex soupire bruyamment avant de se remettre à sourire comme un con.
- Sérieux, mec, laisse ton banc et viens avec nous, dit-il avec un sourire façon Colgate.
Je hausse un sourcil.
- Tu as dis nous ? je demande.
Puis je regarde derrière son épaule et j’aperçois une bande de gars fringués comme des magazines à l’air ahuri. Logique qu’ils fassent cette tronche, Alex LeGrand est en train de parler à un gothique… Les pauvres ! Ça doit leur faire un choc ! Je soupire à mon tour.
- Tu ferais mieux de ne pas rester là, tu sais…
- Pourquoi ?
A quel point ce mec est-il ignorant ?
- Parce que je ne suis pas le genre de personne qui te fera avoir plus d’amis.
Je m’attendais à tout, sauf à ce qu’il éclate de rire !
- Espèce d’idiot ! rit-il à pleins poumons. Ces gars-là c’est des connaissances, mais aucun n’est vraiment ami avec moi, tu sais !
Il pose sa main sur mon épaule et me regarde droit dans les yeux.
- Etre entouré pendant la pause ne veut pas dire qu’on a pleins d’amis. Tout comme être seul ne veut pas dire être insociable.
Et cet abruti fait un clin d’œil, en plus ! Alors que je le regarde, complètement hébété, il hurle à ses "connaissances" d’aller faire un tour ailleurs. Les gars qui l’accompagnaient râlent un bon coup puis, voyant qu’Alex est sérieux, partent.
- Ils sont sympas, ces gars, continue-t-il en se retournant vers moi, mais un peu pot-de-colle par moments… Euh, tu te sens bien ?
En effet, j’ai un sourcil arqué et contemple le sol. J’avais baissé la tête dès qu’il avait retourné la sienne, pour ne pas qu’il remarque que je le fixais d’un air ahuri. Qu’est-ce qui me prend ?! Je me relève en vitesse et souris de force.
- Euh… Oui ! Oui, tout va bien, t’inquiète !
Une chance que ce type soit aussi ignorant : il n’a pas cherché plus loin et est repartit dans ses délires.
Tandis qu’Alex me déballe ses techniques imparables du basket, je réfléchis à ce qu’il vient de se passer.
Pourquoi mon cœur bat aussi vite ?
**
A la cantoche, je fais comme si rien ne s’était passé à la pause de 10 heures. Je prends mon repas et je vais m’asseoir, comme d’habitude. Aussi ai-je espéré toute l’heure d’espagnol qu’Alex retrouve, lui aussi, ses habitudes et me laisse manger mon repas en paix… mais il faut croire qu’il les a perdues à jamais.
- Dan, je peux manger avec toi ? demande-t-il avec un sourire d’ange (qui m’effraie fortement !) Je te promets de ne pas être insupportable !
Pour toute réponse, deux mots sont sortis de ma bouche.
- Trop tard.
Le basketteur gonfle une joue en protestant :
- Mais j’ai encore rien fait !
- Tu continues…
- ARGH !
Alex passe en mode "ange blessé" et se jette sur moi avec des yeux de biche.
- Désolé, Dan, désolé ! Mais laisse-moi manger avec toi, steuplééé !
Je l’éloigne de moi, sentant mes joues se réchauffer.
- Pourquoi tu tiens tant que ça à manger avec moi ?
Il regarde autour de lui et se rapproche de mon oreille :
- Les pots de colle de tout à l’heure refont leur boulot ! (il me supplie) Steuplé, Dan, me laisse pas !
C’est pas bon. Pas bon du tout ! Mon cœur bat la chamade et je sais pas pourquoi. Je perds patience.
- Prends de quoi te nourrir avec toi.
- Hein ?
- On se casse.
Je lui attrape le bras et l’embarque avec moi.
Arrivés dehors, Alex se pose devant moi, les bras croisés.
- Vas-y, explique. Il y a un problème dont tu ne peux pas me parler à la cafétéria ?
Un rictus nerveux sort de ma bouche.
- Non, je n’ai aucun problème, Alex, dis-je en me ressaisissant. Mais toi, tu avais l’air d’en avoir, je t’ai donc… aidé.
Un sourire narquois s’est volontairement dessiné sur mes lèvres, histoire de donner un peu de vérité fausse à mes propos. Je continue :
- N’étais-ce pas toi qui disais qu’être seul ne fait pas de quelqu’un un insociable ?
Les yeux de mon voisin de table s’écarquillent et soudain, un sourire vient s’incruster sur son visage. Il se jette sur moi.
- Merci, mec ! Je savais que je pouvais compter sur toi !
Ma poitrine est sur le point d’exploser ! Je me débats.
- Arr… Arrête, Alex !! C’est bon, j’ai compris !! Lâche-moi !
Quand cet imbécile se décide à me lâcher, mon visage – que je tente vainement de cacher – est en feu.
Comment un tel geste peut-il me mettre dans cette état ?!
- Ça va, Dan ? demande Alex en se penchant pour voir mon visage.
Un battement sourd vient faire trembler mon esprit. Son expression…
- Ça va ? insiste-t-il.
…me sort de moi-même…
- Non, je réponds. Ça va pas…
…je l’aime.
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Par Shin Kazumi le 22 Février 2014 à 18:04
Aujourd’hui, c’est mercredi. Un jour encore plus pourri que tous ceux que j’ai vécu jusqu’à présent. Parce qu’aujourd’hui, je vais devoir affronter le regard d’Alex.
Hier, j’ai réussit à sécher les cours du reste de la journée en prétextant un gros coup de fièvre. Mais aujourd’hui, je n’ai plus d’excuse auprès de ma mère, alors je suis obligé d’aller au lycée… Merde.
Alors que je me sers un bol de lait, ma sœur apparaît à côté de moi.
- C’est moi ou t’es très mal réveillé, aujourd’hui, grand frère ?
Elisabeth – que j’appelle Lizy – est née deux ans après moi. Elle est en dernière année de collège, mais elle ressemble beaucoup à une terminale. Elle a des yeux bleus remplis de savoir. Par contre, elle est à deux doigts de créer une pétition contre les coiffeurs – qu’elle déteste par-dessus tout. Beaucoup de proches nous prennent pour des jumeaux, parce qu’on se ressemble comme deux gouttes d’eau.
Je soupire.
- Je n’ai pas très bien dormi, c’est tout…
- A cause de qui ?
J’émets un léger rictus. Lizy est la seule personne au monde à savoir que je suis gay. Je prends une grande inspiration et la regarde droit dans les yeux. Elle comprend sur-le-champ :
- T’es tombé amoureux ?
Rectification : elle comprend un peu trop loin ! Je tente de dissimuler mes rougissements.
- Je n’irai pas jusque là, Lizy ! Je… le trouve mignon, c’est tout !
Ma petite sœur me regarde avec des yeux un peu trop malicieux à mon goût.
- Mais oui, Dan, je vais croire ça. Ecoute, t’es tout rouge ! Ce qu’il t’arrive, cher grand frère, ça s’appelle un coup de foudre !
Je ne sais pas si c’est le fait qu’elle ait insisté sur les trois derniers mots ou le sens de cette expression, mais mon cœur se met à battre soudainement très vite.
- Et sinon, comment il s’appelle ?
- Alex…
- Sympa comme prénom. Tu me le présenteras ?
Pour toute réponse, je hausse les épaules, apercevant notre mère descendre les escaliers.
- Bonjour, vous deux ! nous salue-t-elle comme chaque matins.
- Salut, ‘man.
- Bonjour mamounette !
Eek ! Le côté fayotte matinale de ma sœur a le don de me sortir de moi-même. Je regarde l’heure. Merde, j’vais être à la bourre ! Je finis mon petit déj’ en vitesse grand V et file me préparer. Pendant que je m’habille, ma mère me hurle du salon :
- Au fait, Dan, tu n’as plus de fièvre ?
- Non, maman ! Ça va beaucoup mieux, ne t’inquiète pas !
Je descends jusqu’à la porte d’entrée, ma veste à moitié mise et mon sac choppé à la volée.
- Tu m’en vois ravie, mon chéri, me dit ma mère, au seuil du salon. Et essaye de ne pas trop dessiner, pendant les cours, d’accord ?
Un sourire gracieux se dessine sur ses lèvres. Depuis la primaire, elle voit à chaque trimestre "bon élève, mais dessine à la place de suivre le cours" sur mon bulletin. Disons que ça la déçoit un peu. Je lui souris en retour :
- J’essaierai, maman.
Et je sors de la maison, direction le lycée.
Arrivé devant le lycée, mon cœur rate un battement. Alex est – entouré, comme toujours – devant le gymnase, le point de rendez-vous pour notre classe qui a cours de sport.
Qu’est-ce qu’il m’arrive, bon sang ?! Je m’énerve moi-même. Depuis plus d’une semaine, dès qu’il s’agit de ce gars, je rougis ou mon cœur d’accélère. C’est chiant ! D’après ma sœur, c’est un coup de foudre, mais moi je pense que c’est surtout des conneries ! Franchement, qui tombe amoureux au premier regard ?
Je chasse ces pensées insensées. Une voix que je ne connais que trop bien m’interpelle :
- Dan !!
Alex, le sportif de ces dames, me fait de grands signes depuis la porte. Quel sourire niais ! Et dire que je le supporte depuis plus d’une semaine ! Alex se rapproche de moi – voyant que je n’allais pas accélérer pour lui ! – et je sens une vague de haine émaner de ses "connaissances". Quel amour !
- Comment ça va bien, man ? me salue, comme à son habitude, Alex.
Je lâche un regard furtif à sa bande avant de répondre nonchalamment :
- Bof.
Je suis obligé de faire appel à toute ma force intérieure pour ne pas exploser de rire en voyant la tronche que tire mon voisin. Je l’ai dépité, avec ma réponse !
- Franchement, Dan, plaide le basketteur, tu veux pas être un peu plus… accueillant ?
Le prof de sport – un petit bout de bonhomme pas du tout taillé pour le sport – ouvre le gymnase et nous fait signe de partir nous changer dans les vestiaires. Je regarde mon ami dans les yeux, un sourire narquois aux lèvres :
- A 8h du mat’ ? Franchement, pas assez réveillé pour ça.
Et je pars en direction des vestiaires.
- Eh, le gothique !
Je me retourne. Ça fait une heure qu’on a commencé le sport et nous avons droit à une pause de 10 minutes, que je passe à hydrater ma gorge dans les toilettes. Deux des gars qui traînaient avec Alex hier, se tenaient debout, face à moi, l’œil mauvais. Quelque chose me dit que je leur plaît pas… C’est celui de gauche, le plus grand – qui a une tête de retardé – qui commence :
- Tu as réussi à duper Alex, t’es balèze, toi.
Il n’a pas qu’une tête de retardé, il l’est ! Je hausse les épaules.
- De quoi tu parles ?
Le second, plus petit – et tout aussi retardé ! – entre en scène. Il me plaque contre le mur avec force et frappe le mur à deux centimètres de ma tête.
- Nous prend pas pour des blaireaux, petit con !
Je dégage sa main d’un coup sec. Petit con ? T’es plus petit que moi ! Je prends les armes :
- Me cherchez pas, les gars.
- Pourquoi ? demande ironiquement le premier. Tu veux nous faire quoi ?
J’inspire profondément en seule réponse. Je pense que ce geste n’a pas beaucoup plu à mes… agresseurs ? Enfin, quoi qu’il en soit, le second doit avoir des neurones en collision. En deux secondes, j’étais au sol, la joue gauche boursouflée, un filet de sang coulant de ma bouche. ‘Tain ! C’est qu’il a de la force !
- Tu disais ? dit-il, un visage de tyran victorieux au visage.
D’un revers de main, je retire le sang qui coule de ma bouche. Je me relève et me tiens droit devant lui. Sa tête m’arrive à l’épaule.
- Je disais que t’aurais pas dû faire ça.
Ma voix est menaçante, pleine de tuerie. Celle de mes adversaires perd son assurance.
- Qu’est-ce que tu raconte, pauvre fou ?! hurle le premier. Tu crois nous faire quoi, avec tes airs de racaille ?!
Une envie de sang parvient jusqu’à mon esprit.
- Des airs ? Non…
Je souris sadiquement et serre le poing.
- Je dirais plutôt des souvenirs !
- Dan ?!
La voix d’Alex me tire de mes pensées sanglantes. Il me fixe, une lueur étrange dans les yeux. Je baisse les yeux vers les deux cadavres qui gisent à mes pieds. Sans m’en rendre compte, j’ai passé à tabac mes deux agresseurs. J’écarquille les yeux. Quand est-ce que j’ai fait ça ?! Alex prend le pouls des deux blessés.
- Ils sont vivants, dit-il d’un ton soulagé.
J’ai du mal à respirer. Alex lève la tête vers moi et je vois la seule chose au monde que je ne voulais pas voir sur lui. De la peur.
L’air frais me manque. Je suis assis dans le bureau du proviseur depuis maintenant 3 heures. Au fil des minutes, les choses sont devenues plus claires dans mon esprit. J’avais perdu le contrôle de mon corps et ce dernier a agit tout seul. Et j’ai tabassé deux lycéens jusqu’au sang.
Alex est lui aussi dans le bureau. Le proviseur a tenu à ce qu’il vienne témoigner. Ils me regardent tous les deux d’un œil mauvais.
- Très bien, Dan, commence le proviseur. Alex a terminé de me raconter ce qu’il a vu. A ton tour, maintenant. Quelle est ta version des faits ?
Je soupire. Je me sens honteux d’avoir fait une chose pareille.
- Eh bien… Je ne sais pas, monsieur.
- Tu ne sais pas ? Comment ça ?
Je ravale ma salive. Je sens le poids du regard d’Alex sur moi. Je revois son visage teinté de peur lorsqu’il levait ses yeux vers moi, qui avait les poings couverts d’un autre sang que le mien.
- Je ne sais pas ce qu’il s’est passé, monsieur. Je me souviens seulement de ces deux garçons qui sont venus me voir. Ils disaient vouloir savoir quelque chose sur moi. Mais comme je ne savais pas de quoi ils parlaient, ça a dégénéré.
Je ferme les yeux, ma gorge se serre.
- Après, c’est le noir.
Je n’ose même pas lever les yeux vers le dirigeant de l’interrogatoire.
- Très bien.
Le proviseur se lève et se place devant moi. Je sais ce qu’il va dire. C’est un discours que je n’ai entendu que trop de fois.
- Dan, tu es exclu du lycée pour une semaine.
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Par Shin Kazumi le 23 Février 2014 à 12:06
Aujourd’hui, c’est jeudi. Depuis hier, je suis exclu du lycée pour violence envers autrui. Il est 11h26 et je ne me suis toujours pas levé, trop honteux pour affronter la lumière du soleil.
La sonnerie de la porte d’entrée retentit. Je ne me lève pas pour aller ouvrir. J’ai honte de moi-même.
La sonnerie de la porte d’entrée retentit une deuxième fois. Puis une troisième. Au bout de la quatrième, voyant que le visiteur ne partirait pas, je me lève et ouvre la porte. Mes jambes sont à deux doigts de me lâcher lorsque je vois Alex sur le seuil.
- Salut.
Il se tient droit et parle clairement, mais son regard est froid. C’est logique. Je baisse le regard instinctivement.
- Entre, Alex…
Le basketteur obtempère en silence. Il s’assoit dans le canapé du salon et me regarde avec des yeux froids. Je m’assois sur celui d’en face.
- J’aimerai que tu m’explique ce qu’il t’es arrivé hier, Dan.
- Mais je… je l’ai déjà expliqué dans le bureau du proviseur ! C’est tout ce que je sais… Je ne sais vraiment pas ce qui m’a prit.
Les épaules de mon ex-voisin de français se détendent un peu. Il soupire.
- Et ta famille ? Elle pense quoi de tout ça ?
Je reste quelques secondes silencieux. Ma famille ? Un rictus s’échappe de ma bouche.
- Ma sœur et ma mère y sont habituées. Ça n’est pas la première fois que ce genre de situation m’arrive…
Le visage d’Alex s’agrandit.
- QUOI ?! (il se lève brusquement) Comment ça "ça n’est pas la première fois" ?! (il m’attrape le tee-shirt) T’as déjà tabassé jusqu’au sang combien de personnes ?!
Il est paniqué. Et moi, je ris.
- Je te l’ai déjà dis, non ? Tu ne devrais pas rester avec moi. Je ne suis pas… quelqu’un de bien.
- Comment ça ?
Alex me lâche et s’assoit à côté de moi. Dans ses yeux, il n’y a rien d’autre que de la peur. De quoi a-t-il peur ? De moi ? De ce que j’ai fait ? Ou bien de ce que je vais lui dire ? Je ferme les yeux.
- Tout t’avouer ne t’arrangerait pas.
Je souris. Par désespoir.
- Je m’en moque.
Hein ? Je lève les yeux sur lui. Il me fixe avec des yeux déterminés.
- Je m’en fous que ça ne m’arrange pas ! crie-t-il. Je ne suis pas là pour ça ! (il se lève, face à moi) Les deux types que t’as tabassés ont dit, à l’hôpital, que tu avais parlé de "souvenirs de racaille"… Explique-moi, s’il te plaît !
Ah oui, c’est vrai… Je respire profondément. Mon passé n’est pas… pur.
- Très bien. Assis-toi, s’il te plaît.
Il obéit. Et mon passé, que j’espérais anéanti, refait surface.
- Au collège, je n’étais pas un garçon normal. Les ambulances allaient et venaient tous les jours. Tous les jours, j’envoyais quelqu’un à l’hosto. N’importe qui. Elève, prof, tous y passaient. Je me moquais de qui je frappais. On m’appelait "le fils de Satan".
- Hein ? Mais pourquoi tu faisais ça ?
- Je ne sais pas. Je suis né avec une force supérieure à la normale et les événements qui sont survenus pendant mon enfance ne l’ont pas tournée à mon avantage.
- Quels événements ?
- Là, on atteint le point critique dont je ne veux plus parler.
- Mais moi, je veux savoir !
Je regarde mon voisin, dépité. N’apprendras-tu donc jamais à te taire, crétin ? Je soupire. Alex insiste :
- Allez, steupléééééé !!!
Je déglutis. La dernière fois qu’il a dit ça, il m’a fallut moins de 5 minutes pour me rendre compte que je ressentais quelque chose à son égard… Pris au dépourvu par son regard d’ange – qui m’a fait rater un battement, d’ailleurs – je poursuis mon récit.
- Pendant ma cinquième, j’ai vu mon père se faire assassiner sous mes yeux.
Le visage d’Alex se décompose sur-le-champ.
- Ah… carrément…
- Oui… J’ai mis plusieurs semaines à m’en remettre. Quand, après, je suis revenu en cours, les gens de ma classe m’ont tous demandé si ce n’était pas un soulagement, qu’il soit mort.
- Hein ! Mais pourquoi ? Ils sont malades !
- Non, ils avaient un peu raison. Mon père était un yakuza qui s’était exilé en France.
- HEIN ?! (Alex se lève, surpris) T’es le fils d’un yakuza ?!
- Oui (je le fais se rasseoir) Je suis le fils d’un yakuza. Mais il était un bon père ! Il m’a apprit beaucoup de choses, comme me défendre, être gentil avec ceux qui le sont avec moi, le dessin, la musique,… J’étais heureux, avec lui !
Je marque une pause, le cœur serré de regrets, puis je reprends :
- Mais ses ennemis ont réussit à le retrouver, après 26 ans d’exil, et se sont débarrassés de lui. Mais cela ne leur suffisait pas. Il a fallut qu’ils me forcent à assister au carnage.
Sans le vouloir, une larme avait coulé le long de ma joue. Alex, à ma grande surprise, la chasse d’un doigt. Mon cœur cesse automatiquement de battre. Je détourne la tête, de peur qu’il ne remarque quelque chose.
- Donc, si je comprends bien… hésite mon voisin. Tu te bas depuis la mort de ton père comme pour… combler une sorte de vide ?
- En quelque sorte, oui. Je suis allé voir plusieurs psys et aucun n’a été capable de trouver une solution…
- Et la bagarre d’hier, c’était aussi à cause de ça ?
- Pas vraiment…
Je serre les poings. Les cadavres baignant dans leur sang de la veille remontent à mon esprit.
- Hier, c’était, disons… une vague de souvenirs. Lorsque le plus petit des deux gars m’a frappé, j’ai eu la même envie qu’au collège : du sang. (j’aperçois le visage d’Alex se blanchir subitement) Le trou noir, ça doit être à cause du fait que j’ai renié mes envies de bataille pendant un an et demi…
- En gros, t’as l’esprit qui a disjoncté, quoi !
Je regarde mon ami. Il a le visage d’un enfant que l’on aurait privé de son goûter. Son expression est tellement insolite que je ne peux m’empêcher de rire. Alex me rejoint rapidement.
- Tu souris enfin de bon cœur !
Sa phrase me prend au dépourvu. Il me toise, un sourire malicieux aux lèvres.
- Après ce que je viens d’apprendre, je me dis que tu n’es pas le monstre dont on parle au lycée.
Bon Dieu, la rumeur a dû se répandre jusqu’au collège de Lizy ! Je soupire. Le lycée m’était complètement sorti de la tête, après mon histoire. Je souris.
- Un monstre, hein ?
- Tout le monde parle de toi avec ce surnom, maintenant. (il soupire) Quelle bande de blaireaux !
Soudain, une lanterne parvient jusqu’à ma cervelle noire :
- Au fait, Alex…
- Oui ?
- T’as pas cours ?
A en juger par le sourire niais qui s’empare de sa face, il en a rien à battre, des cours. Je le fixe, dépité. Il me répond :
- Tu sais, je sèche très souvent, alors quelques heures de plus ne vont faire écrouler le lycée !
Quel boulet !
- Tu sais qu’on a le bac de français, à la fin de l’année, au moins !
- Oui, je sais, mais ne t’inquiète pas pour moi. J’y arriverai de n’importe quelle façon.
Ses yeux sont tellement déterminés que je ne trouve rien à redire. Je regarde l’heure : midi passé. Je soupire et me lève.
- Bon, tu veux rester ici manger un truc ou tu rentres chez toi ?
Lorsque je croise les étoiles subitement apparues dans le regard de mon ami, je me demande si c’était une bonne idée, de lui demander ça… Il s’excite :
- Hé ! Hé ! Je peux cuisiner ? Hein ! Hein ! Je peux cuisiner pour toi ?
Je suis sidéré. Quoi !
- Pou… Pourquoi tu veux cuisiner ? je lui demande, hésitant.
- Parce que j’adore ça ! me répond-il du tac-au-tac. Et puis tu es mon ami, maintenant. J’aime bien cuisiner pour mes amis !
Son sourire gamin fait rater un battement à mon cœur. Je reste pantois pendant des secondes indéterminables. Soudain :
- Et puis ça te donnera l’occasion d’aller t’habiller, aussi…
Je regarde mon pyjama – un simple tee-shirt noir et un pantalon rouge sang – et déglutis.
Ouais, c’est pas une mauvaise idée…
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